LA ROUE DU SOUTHERN CROSS MINOR

L’INCROYABLE ANECDOTE

 

Au cours de mes recherches sur tous les témoignages possibles au sujet de l’histoire du Capitaine Lancaster, j’ai pu entendre des histoires des plus invraisemblables.

La dernière en date me fut racontée par Eugène TONAT un ancien du 3ème Peloton de la 214ème Compagnie de Circulation Routière basée à Adrar.

Déjà quelques mots sur la 214ème Compagnie de Circulation Routière.

214ème COMPAGNIE DE CIRCULATION ROUTIÈRE (1950-1962)


Créée le 1er octobre 1950 à Casablanca (Maroc). Transférée en Algérie dans le Constantinois en juillet 1958, puis au Sahara en mars 1959 avec le PC et PCS au Bordj Militaire d’El-Goléa, le 1er Peloton à Ghardaïa, le 2ème Peloton à Ouargla, le 3ème Peloton à Adrar et le 4ème Peloton à Colomb-Béchar. Rapatriée en novembre 1962, elle est dissoute le 15 décembre 1962 à Sissonne.


Symbolique de l'insigne :

Modèle 1 : L’écu est censé représenter une pointe de flèche. Porte mauresque évoquant les villes où agissait la compagnie. Tour Hassan de Rabat faisant redondance avec l’inscription Rabat en arabe. Foudre des transmissions, moyen vital pour la circulation.
Modèle 2 : Croix du sud traditionnelle. Gazelle sur fond de sable évoquant le Grand Erg Occidental. Représentation du ksar d’El-Goléa. Roue dentée du Train.

 


Source : Jean-Claude Mourot 3ème Groupe de Transport

Lorsque Titus Polidori appela son commandement par radio, alors qu’il venait de retrouver la carcasse du Southern Cross Minor, les « grandes oreilles » étaient derrière (tous ceux qui sont à l’écoute de la fréquence) et comme par hasard une mission de la 214ème Compagnie de Circulation Routière d’Adrar était dans le secteur. Ils arrivèrent bientôt sur les lieux du crash, constatant comme le Groupe Saharien Mixte du Touat ce qu’il était advenu du Capitaine Lancaster près de 30 ans plus tôt.


La dépouille de William Newton Lancaster était toujours là, près du Southern Cross Minor, il ne restait qu’un amas difforme de ferraille, couché sur le flanc dans le désert.

À ce moment les restes de l’avion étaient au complet, c’était sans attendre ceux qui bientôt s’acharneraient sur le dépouillement de l’avion cherchant ci et là ce qu’ils pourraient bien emporter. Il nous serait difficile aujourd’hui de dresser la liste de ceux qui récupérèrent un témoignage physique de ce triste accident.

Nous savons que la montre de Bill fut rapportée par le « Radio » du GSMT. Ce dernier tenta de la négocier lors de son retour à Adrar. Qu’est devenue cette montre ? nous n’en savons rien. Le lendemain le peloton de Gendarmerie, chargé de ramener la dépouille du pilote à Reggan, récupéra l’ensemble des documents que Lancaster avait accroché sur une aile de l’avion (et que Titus Polidori avait replacé sur le siège de l’avion, enquête de la Gendarmerie oblige) plus la plaque « moteur » du SCM et la lampe torche du pilote que me fit parvenir François en juin 2008 après les avoir conservées 46 ans dans sa cave de Bourg-la-Reine où il les avait entreposées. Je transmis aussitôt plaque et lampe au Queensland Museum de Brisbane en Australie comme j’avais pu le proposer à François.


Cinq jours plus tard le Commandant Aubry et son ami le Commandant Mélin effectuaient un déplacement touristique sur le point crash accompagnés de quelques gendarmes et de l’aumônier. L’avion fut passablement bougé de sa position initiale et certains instruments de bord furent récupérés.

Plus tard, d’autres militaires viendront sur le site, la curiosité étant de mise, avant que l’opération de survie de l’armée de l’air en juin 1962 fût réalisée, le 214ème CCR à nouveau dans les parages fit une incursion à cet endroit. Eugène T…, quant à lui, avait fait le pari de récupérer un trophée, montrant ainsi que cette histoire n’était pas un mirage. Il récupéra donc une roue du SCM. La jante était encore équipée de son pneu me dit-il, un pneu « pétrifié » ou plutôt séché au soleil du Tanezrouft pendant 29 ans. Il avait décidé de  rapporter cette roue chez lui en France dans les Pyrénées où il habite encore… Mais lors de son arrivée à Marseille, il ne lui parut plus possible de continuer à traîner cette lourde charge qu’il pensait donner à des voisins anglais, pour qu’ils puissent rapatrier cette pièce au « bercail », drôle d’idée sans doute ?

Au retour, une fois descendu du bateau, n’en pouvant plus de traîner cette lourde charge, tel un galérien enchaîné à son boulet, il se débarrassa de la roue qu’il jeta dans le port de Marseille. Ainsi fut perdue la roue qui manquait à l’avion lorsque l’équipe de Wylton Dickson alla en 1975 rechercher l’épave du Southern Cross Minor.

Nous avions effectivement observé lors de la reconstitution de l’épave de l’avion présenté au Queensland Museum de Brisbane, qu’une roue avait disparu. (Voir photo ci-dessous).


Nous savons désormais que cette roue, à l’instar de la légendaire « Sardine », s’est retrouvée engloutie dans le port de Marseille où elle pourrait encore se trouver sous une épaisse couche de vase. À moins que lors des nettoyages du port elle ne fût récupérée comme trophée par quelqu’un d’autre, ou sans doute jetée à tout jamais dans une quelconque décharge locale.

Nous n’en saurons certainement jamais rien !!!

Alain BROCHARD Février 2016