LES TRANSPORTS AU SAHARA

L'ARMÉE

 

Les légendes et articles sont de Jean François COLOMBET
Rédacteur en chef de « Charge Utile Magazine »

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           Si, du fait des médias, l’attention du grand public est alors focalisée par la recherche pétrolière, étroitement associée au mythe que véhicule le Sahara, il ne faut cependant pas perdre de vue que cette « ruée vers l’or noir » s’effectue sur fond de guerre civile. Ainsi, les difficultés engendrées par les problèmes de franchissement se doublent d’une certaine insécurité dans les zones les plus reculées. Certains transporteurs en font d’ailleurs l’amère expérience. Afin que les travaux pétroliers puissent être menés sans incident, l’armée française intensifie sa présence, notamment sur les grands chantiers tels que ceux des pipe-lines, symboles d’un colonialisme persistant.
Comme les transporteurs civils, l’armée est donc amenée à faire l’acquisition de véhicules adaptés, et ce en grand nombre.

Le bon vieux Berliet GLR 8 est un des premiers à faire l’objet de commandes d’importance. Celui-ci est un GLR 8 b à moteur cinq cylindres MDU 14 à injection Ricardo. Comme nombre de véhicules militaires au Sahara, il est doté d’une cabine couchette. Son équipement comprend en outre une visière de pavillon, un pare-brise ouvrant, deux porte roue de secours, des coffres à lot de bord dans le porte-à-faux arrière et une protection du réservoir de carburant. Les GLR 8 b sont suivis d’importantes livraisons de GLR 8 R de même configuration. La production de ce dernier modèle se voit même poursuivie spécialement pour l’armée après la sortie du GLR 8 M à moteur Magic et alors que la fabrication du GLR 8 R civil a déjà cessé. Malgré sa consommation sensiblement inférieure, le Magic se voit en effet préférer le moteur Ricardo pour des raisons de standardisation et parce que ce dernier supporte mieux les carburants de mauvaise qualité tel que le pétrole dit brut.
(Cliché Fondation de l’automobile Marius Berliet)

La Jeep reste extensivement employée par l’armée en Algérie. II s’agit soit de Willys MB et de Ford GPW datant de la Seconde Guerre mondiale ou de l’immédiat après-guerre, soit d’Hotchkiss M 201 comme celle-ci, aux couleurs du génie.
(Collection Philippe Auvray)

En novembre 1957, le GLC 8 6 x 6 participe à une démonstration au profit de l’armée sur une plage très sablonneuse des environs d’Alger. Opposé à des matériels bien plus légers tels que des Dodge WM 300 4 x 4 Power wagon et des Dodge T 223 WC 63 6 x 6, le nouveau 6 x 6 Berliet étonne les militaires présents par ses capacités de franchissement que les Dodge 6 x 6 n’arrivent à égaler qu’avec une prise d’élan. Décision est donc prise d’équiper les unités de Train en Algérie de 6 x 6 Berliet. Le constructeur lyonnais améliore son véhicule qui devient bientôt le GBC 8 6 x 6, tout en conservant le surnom déjà acquis de Gazelle. C’est un camion de ce type qui ouvre ici un convoi composé en outre de deux porteurs GBO 15 6 x 4 HC à caisse cargo. Au sein de l’armée française, les GBC 8 6 x 6 sont suivis de GBC 8 MK 6 x 6 qui ne diffèrent des précédents que par leur moteur Magic poly carburant, puis par les célèbres GBC 8 KT 6 x 6 dotés d’une cabine spécifique et de caractéristiques spécifiquement militaires.
(Cliché collection Jean-Christophe Branthomme)


Dans Ouargla ensoleillé, ce Berliet GBC 8 6 x 6 cargo sort d'un chemin de traverse. Il contourne une Simca Chambord, garée là à proximité d'une Citroën 2 CV neuve. Nous sommes alors le 30 décembre 1961.
(Cliché Etienne Cadet)


Du fait de son importante charge utile et de ses bonnes capacités de franchissement, le Berliet GBO 15 6 x 4 représente un atout de choix lorsqu’il s’agit d’assurer des transports lourds sur longue distance. L’armée française ne s’y trompe pas, qui commande plusieurs centaines d’exemplaires de ce modèle. Affectés aux CAST (Compagnies automobiles sahariennes du train), ces véhicules reçoivent des carrosseries variées : différents types de plateaux à ridelles bâchés, bennes entrepreneur à ridelles basses et citernes. Ce GBO 15 R 6 x 4 de la toute première série a été pris à Vénissieux, derrière les usines Berliet. Monté sur pneumatiques 1600 x 20 (Michelin H 20 P type aviation), l’engin arbore un pare-chocs étrange à quatre phares.
(Cliché collection B. Garnier)

Ce GBO 15 6 x 4 HC est pourvu d’un plateau à ridelles bâché standard mais, chose rare, il est muni d’un treuil avec porte roue de secours double et surtout dépourvu de la cabine couchette équipant une écrasante majorité des châssis livrés à l’armée. Cette version hors code, reconnaissable à ses ailes et à ses marchepieds modifiés, est prête à rejoindre sa compagnie en 1960. Les éléments en zamak et en aluminium (enjoliveurs de calandre, monogrammes, cadres de pare-brise, etc.) ont reçu une protection spéciale pour éviter toute détérioration par l’air marin lors du transport maritime.
(Cliché Fondation de l’automobile Marius Berliet)

C’est le même type de véhicule que l’on retrouve ici en convoi dans le sud algérien. Ces GBO 15 6 x 4 HC sont tous normalement doté de la cabine couchette. Le cliché a été pris lors d’une des haltes périodiques indispensables à la circulation en convoi.
(Cliché collection Jean-Christophe Branthomme)

L’approvisionnement en carburant étant la principale préoccupation des unités stationnées en zone désertique, l’armée française se dote aussi de GBO 15 6 x 4 HC équipés de citernes Coder. Comme leurs homologues cargo, ces derniers reçoivent une cabine couchette et un porte roue de secours double.
(Cliché Fondation de l’automobile Marius Berliet)

Cette mauvaise photographie prise dans un fort du sud algérien montre une série de Dodge T 223 WC 63 6 x 6, dont certains sont équipés d’une mitrailleuse de 12,7 mm. Une colonne de GBO 15 6 x 4 HC d’une CAST apportant le ravitaillement vient de faire son entrée dans l’enceinte.
(Cliché collection Jean-Christophe Branthomme)


On ne fait pas d’omelette sans casser d’œufs et la circulation saharienne se révèle pleine de pièges. Au fameux fech-fech, il faut ajouter la boue provoquée par les pluies abondantes qui inondent une partie de l’Algérie de mai à septembre, ainsi que le manque de stabilité des bords de piste. Ce GBO 15 R 6 x 4 du service des essences des armées en a fait la rude expérience à Tinfouchy, entre Colomb-Béchar et Tindouf. Ce véhicule équipé d’une citerne Coder de 16 500 litres est monté sur pneus H 20 P (1600 x 20) à l’avant et sur G 20 (1400 x 20) à l’arrière. Ce camion et plusieurs autres identiques assurent le ravitaillement de Colomb-Béchar, en remplacement de Magirus-Deutz A 6500 jugés inadaptés à cet usage.
(Cliché H. Perdrisot)

Comme dans le civil, les GBO et TBO constituent des engins appréciés des militaires pour leurs qualités de franchissement et leur robustesse. Pour preuve, ce tracteur militaire, dont l’immatriculation a été banalisée, a été photographié en mai 1967 dans un parc du génie à Colomb-Béchar. Si sa peinture est quelque peu défraîchie, il affiche encore une configuration proche de celle d’origine, semi-remorque comprise. Ce TBO est l’un des quatre exemplaires livrés par Berliet Algérie en mai 1960 à l’armée française et affectés à Colomb-Béchar (3ème Compagnie Saharienne du Génie), El Golea, Fort-Flatters et Amguid. À l’époque, la livraison de ces véhicules s’accompagne de celle de quatre GLC 8 M 4 x 4 benne, tous étant destinés à l’entretien et la réfection des pistes de la région.
(Cliché Maurice Bethoux)

À côté des matériels spécifiques, l’armée dispose bien sûr de nombre de véhicules classiques, tels ce wrecker Ward-LaFrance 1000 series 5 qui a conservé sa configuration d’origine. Photographié en avil 1967 dans une base du génie, l’engin porte logiquement les couleurs rouge et noir de son arme. Doté d’une immatriculation réglementaire de l’armée française, il dispose d’un poste à souder embarqué, comme le prouvent les bouteilles d’oxygène et d’acétylène qui dépassent derrière sa cabine.
(Cliché collection Maurice Bethoux)


En avril 1961, la 962ème compagnie d’équipement de bennes rattachée au 19ème régiment du génie utilise notamment des White 666 convertis en tracteurs de semi- remorques, qui servent à transporter les engins de travaux publics sur les sites des chantiers routiers, ici des bouteurs Allis-Chalmers HD 15 A à moteur six cylindres GM de 122 chevaux. Directement issus des surplus de l’US Army, ces véhicules n’ont même pas fait l’objet d’une peinture complète. Seuls leurs marquages d’origine ont été masqués à la peinture noire.
(Cliché collection Philippe Auvray)

La caravane des véhicules en partance pour Reggan comprend aussi ce Berliet TBO 15 6 x 4 HC équipé d’une potence de manutention, et tractant une semi-remorque spéciale à auvents latéraux également carrossée par Genève.
(Cliché collection Etienne Cadet)

C’est encore un White 666 qui s’apprête à franchir un gué sur ce cliché. L’ensemble est suivi par un Autocar U 8144 T lui aussi attelé à une semi-remorque porte engin.
(Cliché collection Philippe Auvray)

À partir de 1957, l’armée française installe un centre de recherches et d’essais atomiques à Reggan, dans le sud-ouest algérien, aux portes du Tanezrouft. Les travaux très spéciaux à mener conduisent les militaires à s’équiper de matériel ad hoc. Parmi les différents matériels achetés figure ce GMC CCKW 353 A2, dont la caisse photographique munie d’un groupe électrogène est fournie par Genève.
(Cliché collection Etienne Cadet)

 

Source :

Avec l’aimable autorisation de
Jean-François COLOMBET – Rédacteur en chef
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